Salut !
C’est le retour de Marie-Cu’ ! Et autant vous prévenir, elle a une patte dans le platre et donc du temps pour lire et bloguer !
Donc, aujourd’hui, on va causer sexisme. Parce que c’est un sujet récurrent dans la vie de Marie-Cu, parce qu’elle vient de lire un bouquin de Sheryl Sandberg sur les femmes en entreprise, et parce que de manière plus générale ça l’atteint et que ça la gonfle que rien ne change.
Bref. Donc, Marie-Cu, ce n’est pas un secret, travaille dans la Grande Entreprise (et oui, toujours, malgré ça, ça, et ça), dans un secteur qui n’est pas connu pour son progressisme et son ouverture au sexe faible (haha). Concrètement, ça veut dire que dans toutes les situations courantes, elle est la seule fille. En réunion, à table, dans le bureau, tout le temps quoi.
Récemment, une étude sur l’égalité hommes-femmes a été publiée en interne. Les conclusions sont sans appel:
- Salaires: entre 5 et 20% de différence selon les bandes salariales*. La différence s’accroit en montant en hiérarchie.
- Evolutions: un homme reste 2 à 4 ans dans la même bande, une femme 6 à 8.
- Je vous parle pas de l’écart salarial global ou du nombre de représentantes dans les bandes élevées parce que je vais abimer mon clavier.
* –> « bande salariale » : joli mot qui désigne toutes les personnes qui sont dans la même case pour les salaires. Concrêtement, ça veut dire: mêmes attributions, même niveaux de responsabilités. Souvent, ça veut aussi dire même niveau d’études, et ancienneté comparable – sauf en cas de stagnation comme au deuxième point.
Une étude comme il y’en a probablement dans plein d’entreprises, avec des conclusions relativement standard, finalement. Mais ce qui est fun (et révélateur), c’est comment l’information a été traitée.
D’abord, la direction. Qui a minimisé le problème en annonçant que les statistiques ne sont pas fiables car réalisées sur des échantillons trop petits. Pas assez des femmes pour arriver à une conclusion. Vous ne rêvez pas.
Puis, les collègues : « Oui, mais tu comprends, on peut pas comparer ».
Ah ben oui. Parce que les spécificités de la structure de l’entreprise ne permettent pas de tirer des conclusions (heureusement que les écarts de salaires sont là, sinon la pauvre structure de l’entreprise, on n’en parlerait jamais tellement y’a rien à en dire).
Parce que les évolutions plus lentes c’est les grossesses (qui durent donc 3 à 4 ans par bande salariale, on fait pas les gosses à moitié hein).
Parce que si on ne nomine pas de femmes aux postes importants, c’est qu’il y’en a pas de dispo (de femmes). Sont trop occupées à faire des gosses dans les échelons inférieurs, faut croire.
Bref, on peut pas comparer.
*Petit apparté* Suite aux deux plans sociaux et aux réorganisations qui ont suivi, il y’a eu une série de nominations aux postes de « grand managers ». 27 nominations. 26 hommes. Une femme : « Assistante DRH ». *Fin du petit apparté*
Je reprends. Donc, les collègues et la hiérarchie, minimisent l’étude en utilisant deux arguments classiques et imparables:
- L’étude est mal faite donc les conclusions sont irrecevables (donc tout va bien).
- Ouais c’est à cause des grossesses.
Encore une fois, rien de nouveau. Vous vous demandez bien où je veux en venir hein.
Et bien simplement à ce constat: on nie le problème, il a beau être prouvé, chiffré, rapporté, approuvé par le CE, il n’existe pas. Y’a pas de victimes, donc, y’a pas de problème. D’ailleurs, elles se plaignent pas, c’est bien que ça les gêne pas (je vous jure j’ai entendu ça). Si elles se plaignent, on nie en sortant une justification quelconque (du genre de la structure de l’entreprise).
Petit extrait d’une conversation avec le chef, quand l’étude est sortie:
- Le Chef : « mais TOI, tu te sens discriminée dans ton quotidien TOI ? »
- Marie-Cu (prise de court) : « ?! Coin ? »
- Le Chef : « oui, on fait toujours des hauts cris, mais en fait y’a pas de problème, l’étude prend pas en compte la structure complexe de l’entreprise blablablabla ».
Mauvaise réponse de ma part, certes. Mais en fait, ça va plus loin.
Impression d’être pas écoutée, d’être transparente, de parler à des murs. Chaque proposition, refusée direct. Chaque idée, refusée direct. Chaque suggestion, refusée direct. Chaque plainte : « nan mais t’exagère [justification] ». Un jour, Marie-Cu a fini par cracher du feu.
Marie-Cu est devenu un dragon. Parce qu’elle ne cède pas et râle (fort) jusqu’à être entendue.
Au début, Marie-Cu l’a (très) mal vécu. Et puis elle a fini par constater que toutes les autres femmes au travail sont soit:
- Des dragons
- Limitées
Je vous jure. Soit elles sont un peu compétentes / efficaces et c’est des DRAGONS. Genre, on les présente : « oui, elle rale tout le temps, tu vas voir, c’est un dicatateur, on peut pas travailler avec elle, blablabla » (spoileur: en fait la meuf est normale). Soit elles sont juste normales à faire leurs heures et leur taf, et alors on dit « oui, elle est bien hein (regard appuyé), mais enfin tu vois quoi … » (spoileur: la meuf est normale, mais usée).
En fait, dans la Grande Entreprise de Marie-Cu, quand t’es une femme, on t’écoute pas. Du coup, soit tu parles plus fort jusqu’à gueuler (c’est arrivé), et tu deviens un dragon. Soit tu laches l’affaire parce que c’est usant, et tu deviens limitée.
L’autre jour, Marie-Cu trainait sur un forum. Une des sections a un titre un peu lourdingue sur la base de « section femmes ici on cause cuisine hahaha ». C’est pas bien méchant, c’est surtout du 2nd degré, le reste du contenu est neutre, donc, c’est pas très grave. Mais voilà qu’un utilisateur se dit que bon, c’est pas méga classe quand même, faudrait ptet changer.
Levée de boucliers. Rolala on n’a plus le droit de rigoler. Argument ultime « ouais mais si elles se plaignent pas y’a pas de problème ».
Marie-Cu a été voir. Plein de gens se plaignent. Hommes, femmes. Mais encore une fois on n’ECOUTE pas (enfin vu que c’est un forum on ne lit pas). On nie.
C’est super facile, en fait, de nier un problème. Puis du coup c’est pratique y’a pas de victimes. Y’a pas de bonne réponse à la question du chef : quelle que soit la réponse, il aurait nié le problème en se félicitant de ne pas être concerné.
On arrête pas de dire que les femmes se plaignent tout le temps. Y’a plein de jolies images inspirationnantes sur le net avec « comment comprendre une femme » ou « les femmes, si mystérieuses ». On n’est pas mystérieuses. Mais vous ne nous comprendrez jamais si vous ne nous écoutez pas.

Fig1. Ce que je disais.
Bises platrées,
Marie-Cu, Autruche, tout simplement.
Ah……les grossesses plus les jambes plâtrées….c’est pas bon du tout pour les statistiques! Je parie qu’un plâtre féminin coûte plus cher à l’entreprise qu’un plâtre masculin! C’est c’oin drôle..
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