Marie-Cu, la crise, la routine

Marie-Cu est une oie moderne, on l’a dit. Elle travaille, mange avec un couteau, galère avec son stupidphone 2.47G, passe l’aspirateur dans le poulailler, plaque des grosses le dimanche après-midi, bref, une petite vie bourgeoise bien remplie.

A midi à la cantine elle cause premiers mots du petit dernier, dernière émission de France 2 en vogue, prêt immobilier (Agathe connait tous les taux d’emprunts de ses collègues – avant et après renégociation).

Mais voilà, depuis quelque mois, la rumeur coure. L’Entreprise ne va pas bien. A midi, ça cause cours du BRENT (en chute libre), projets attribués (aux autres), appels d’offres (annulés ou reportés).

Et puis un jour, avec force graphiques et optimisme inébranlable (et article dans Le Figaro), les gros mots sont lâchés: restructuration, plan de sauvegarde de l’emploi, départs volontaires: l’Entreprise licencie, les négociations sont lancées. A midi, le steak fait la causette aux haricots (Agathe est une femelle, elle mange des légumes), les gens sont atterrés.

1/4 de la population doit dégager, premier départ fin novembre, Marie-Cu est concernée.

fig1: l'annonce

fig1: l’annonce.

Marie-Cu, elle, se sent soulagée: c’est le coup de pied au croupion qui lui fallait pour se décider à quitter ce monde dont elle a bien du mal à faire partie. En plus, ça fait des vacances gratuites (certes, pas en juillet, mais on peut pas tout avoir).

Les négociations continuent, la vie suit son cours. A midi, ça cause, beaucoup. Et si on ne trouvait rien ? Et si on se faisait tous virer ? Et si il y’avait une deuxième vague ? Tu as vu les conditions ? On est tous concernés. Ils ont changé les catégories impactées. Les concurrents licencient aussi, on retrouvera jamais de travail, notre vie est fichue, comment on va pouvoir payer la nounou ?!

Maie-Cu est vaguement lassée par ce brassage de non-informations incessant (c’est quand même mieux de brasser du houblon, au moins on a des résultats) et par le pessimisme ambiant. Et elle est frappée par les comportements des collègues:

  • Il y’a celui qui est dans le déni. Il ne peut pas se faire virer, il a du travail par-dessus la tête de toute façon.
  • Il y’a celui qui n’est pas concerné, mais qui est terrifié quand même. Dans un pays avec 10% de chômage, le licenciement, ça craint. (ndlr: ingénierie, expérimenté).
  • Il y’a ceux qui pensent ne jamais retrouver de travail. Ben oui, les concurrents licencient aussi, et puis les autres domaines, tu comprends, c’est pas pareil. On n’a pas les compétences techniques, ils font pas d’ingénierie eux, et puis le salaire, comment on va faire ? On est déjà pas bien riches on va devoir être payés encore moins ?! (ndlr: ingénierie, pétrole)
  • Il y’a celui qui est au taquet ma chérie dès qu’on parle d’embauche. La boulangerie de Pornichet recrute ? T’as un contact ? Quand ? C’est dans la zone 5 ? C’est quoi le salaire ?
  • Il y’a celui qui a besoin de faire le point sur la situation en cours. Le même point. Tous les midis.
  • Il y’a ceux qui flippent en silence. Pour qui ces vacances auront un goût particulier, ce sont peut-être les dernières.
  • Il y’a les silencieux qui ne disent rien, bien qu’ils soient les plus impactés.

Marie-Cu est peut-être trop optimiste, mais elle considère que le changement, ça peut être une bonne chose (et c’est maintenant). Changer de domaine, de collègues, d’air. Elle est de ceux qui pensent que quand on mène une vie confortable, un salaire un peu plus petit, on fera avec. Qu’en étant ingénieur pas complètement débutant, on peut retrouver un job relativement rapidement, quitte à mettre de l’eau dans son vin et à sortir de sa zone de confort.

Cet article aura deux conclusions:

  1. Ta boite recrute ? Marie-Cu est intéressée.
  2. T’as rien à faire un midi et tu ferais bien un pic-nique avec des gens pour discuter de tout sauf de licenciement ? Marie-Cu est intéressée.

Marie-Cu, Oie-ptimiste de la vie active.

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2 réflexions sur “Marie-Cu, la crise, la routine

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